Une mosquée avec une salle de prière commune pour hommes et femmes, des prêches de femmes imams, une lecture progressiste de l’islam: tels sont les projets, similaires à ce qui existe déjà en Allemagne, de deux associations musulmanes à Paris.
Paris: deux projets de mosquées progressistes avec des prêches de femmes imams
Une mosquée avec une salle de prière commune pour hommes et femmes, des prêches de femmes imams, une lecture progressiste de l’islam: tels sont les projets, similaires à ce qui existe déjà en Allemagne, de deux associations musulmanes à Paris.
Un premier projet est porté par une doctorante en islamologie à l’Ecole pratique des hautes études, Kahina Bahloul, et un professeur de philosophie, Faker Korchane. Tous deux ont élaboré les « statuts » d’un lieu de culte, a confirmé à l’AFP Mme Bahloul, après une information du Monde.
« Nous étions insatisfaits de l’offre actuelle des mosquées musulmanes: si ce n’est pas du salafisme, cela reste un islam très traditionaliste, avec une certaine façon de lire les textes fondateurs, qui reste très dogmatique, pas toujours très ouvert. On a envie de vivre l’islam autrement« , résume cette femme de « sensibilité soufie », une branche mystique de l’islam.
Alors qu’« aujourd’hui les femmes sont souvent exclues de la salle principale du lieu de culte, la mosquée « Fatima » (nom du projet, ndlr) accueillerait dans une même pièce hommes et femmes, avec un côté pour les hommes et un autre pour les femmes; mais tous seraient sur la même ligne« , explique Mme Bahloul.
Un imam homme et un imam femme feraient en outre les prêches du vendredi, une semaine chacun. Si l’Allemagne, le Danemark ou les Etats-Unis ont déjà des imams femmes, ce serait une première en France.
« Les gens qui viennent sans se couvrir la tête seront également les bienvenus« , ajoute Faker Korchane, sur son site internet où il défend l’islam mutazilite, une école de théologie qui allie la raison à la foi.
« De nombreux musulmans aspirent à une nouvelle religiosité mais ne l’expriment que sous forme livresque ou de conférences. (…). Il est temps de cesser de dire comment on voit l’islam, il faut le montrer et l’incarner« , dit-il encore, voulant aussi « montrer la profondeur de l’enseignement islamique capable de traverser l’espace et le temps« .
En recherche de financements, ils aimeraient que Fatima, « idéalement et symboliquement », soit à Paris.
Un deuxième projet… Une autre histoire
Un deuxième projet, porté par deux femmes, est à l’étude. Celui d’Anne-Sophie Monsinay et Eva Janadin, fondatrices de Voix d’un islam éclairé (VIE) -Mouvement pour un islam spirituel et progressiste: la « mosquée Simorgh ».
Elles ont déposé à l’automne les statuts d’une association à but non lucratif, « qui a vocation à devenir une association cultuelle« , et sont à la recherche de financements et d’un lieu, « si possible Paris« , a affirmé Eva Janadin.
« Il est urgent aujourd’hui de construire de nouveaux lieux de culte pour incarner nos principes et répondre aux besoins des musulmanes et musulmans ; orphelines et orphelins de mosquée ; qui se sentent très seuls dans leur pratique de l’islam et ne se retrouvent plus dans la vision majoritaire du culte musulman« , écrivent-elles dans l’argumentaire de leur projet.
D’où la volonté d’avoir une mosquée « totalement mixte, sans séparation gauche-droite comme dans la mosquée Fatima, avec des femmes imams (elles-mêmes, ndlr) et une liberté totale du point de vue vestimentaire« , précise Mme Janadin.
Autre souhait, celui d’avoir des sermons en français, l’idée étant « d’inciter une véritable appropriation de l’islam par les musulmans français en leur permettant une compréhension approfondie du discours« .
En attendant de trouver une adresse, les uns et les autres, investis dans le dialogue interreligieux, sont à la recherche de prêt de locaux auprès des communautés chrétiennes ou juives.
En juin 2017 s’est ouvert à Berlin une mosquée « libérale » baptisée Ibn Rushd-Goethe, où hommes et femmes peuvent prier côte à côte, et qui prône un islam moderne. Les prêches sont en allemand, et se font dans un bâtiment prêté par la communauté protestante. L’imam, Seyran Ates, une avocate et militante des droits des femmes très connue en Allemagne, a toutefois été placée sous haute protection policière.