Etre influenceuse aujourd’hui au Maroc équivaut à une réussite professionnelle. Une carrière tracée vers la gloire facile à coup de posts et de hashtags. Bienvenue dans un monde artificiel où l’argent se gagne facilement (parfois), sans nécessiter d’études, de diplômes ou de pédigrée élitiste.
- L’influenceuse marocaine arbore toujours, mais alors toujours, un brushing impeccable. La mode des frisottis, du cheveu au naturel et des boucles en cascade ne l’atteint pas. Pour elle, le poil sur le caillou se porte raide comme une baguette.
- Qui dit chevelure domptée dit bien entendu ongles manucurés. C’est le B.A.BA, pour toute star marocaine du web qui se respecte. N’allez pas croire qu’elle se colorie les ongles chez elle, entre deux tasses de thé, en mode Bridget Jones. Que nenni, l’influenceuse a élu domicile chez Mustapha, moul coiffeur dial rassdarb.
- Attention toutefois à ne pas vous méprendre ! L’influenceuse va chez Mustapha, son ami moul coiffeur, aussi souvent que le lui permet son compte en banque (même si celui-ci lui fait aussi souvent crédit que son banquier). Pour voir et être vue, elle a quelques bonnes adresses : Il faut bien s’attribuer une étiquette prestige. Toutefois, elle veille à se rendre dans ce genre d’endroits déjà tirée à quatre épingles. C’est tellement compliqué la vie d’influenceuse. Mustapha ne lui en tient pas rigueur… il sait qu’il n’a pas l’étoffe des grands, ceux qu’on tague dans une story et que les hashtags #theplacetobe #ilovemyhair #Mustaphaisthebest… ne sont pas pour lui.
- Une bonne influenceuse sait comment tirer avantage de toute situation. Rien ne résiste à l’influenceuse et à son arme fatale, son smartphone. Restaurants, spas, hôtels… Il suffit qu’elle pointe le bout de son nez et dégaine comme carte d’identité son nombre de followers pour qu’on se pâme devant elle et qu’on lui offre monts et merveilles.Une influenceuse ne gaspille donc pas d’argent en sorties ! Bien plus forte que le dollar, plus dangereuse que le bitcoin, sa monnaie d’échanges est fatale : elle offre posts et stories de quelques secondes contre menus, soins, massage, voyages, vêtements, make-up, etc… Et une fois parvenue dans le top 5 des influenceuses, on la paie (et cher) pour qu’elle daigne pointer son joli minois chez vous.
- Pour être célèbre, l’influenceuse marocaine arbore un dress code de luxe, composé d’articles de luxe… achetés au marché noir à LmdinaLkdima ou aux Twin Center (chez qui vous savez). Et ben oui ma bonne dame, il faut bien commencer quelque part ! Les comptes officiels de Vuitton, Prada, Dolce &Gabanna j’en passe et des meilleurs sont taggués au quotidien pour décrire chaque pièce (contrefaite) qui compose la tenue de la modeuse marocaine. Objectif, se faire remarquer par ces marques et, sait-on jamais, devenir la future égérie digitale marocaine de l’une d’entre elles ou au pire, recevoir un petit cadeau…
- L’influenceuse marocaine est partout ! C’est une devise, être de tous les rendez-vous, de toutes les conférences de presse, les voyages, les déjeuners… PARTOUT on vous dit. Ne vous étonnez donc pas si l’instagrameuse mode que vous suivez se transforme parfois en instagrameuse d’un autre genre. Elle n’hésitera pas à switcher ses Louboutin pour la recette d’un jus healthy( il y a un blender à la clé), ou à réaliser des tutos beauté en mode experte du genre alors qu’elle vous parlait la veille de sa recette de tarte au citron. Autrement dit, pour plaire aux marques et tenter de toucher le jackpot en signant un contrat à plusieurs zéros, l’influenceuse marocaine, telle un caméléon, change de peau et de discours aussi souvent qu’il le faudra.
- Quand elle est voilée, l’influenceuse marocaine fait de la religion son principal atout marketing. Elle se qualifie de « hijabista » et se fait l’emblème de la « modestfashion ». L’influenceuse voilée verse dans la langue anglaise pour une bonne raison, voire même plusieurs. Primo, ça fait cool et donc ça rend trendy son look à tendance « je suis religieuse mais ça m’empêche pas d’être dans le coup ». Deuzio, en parlant anglais, en taguant anglais et en hashtaguant anglais, elle s’inscrit dans cette grande communauté américano-orientale qui a pour mission de faire du hijab un accessoire de mode, voire même, encore plus fort, de Street Wear. Et dans ce cas là, elles deviennent des Mipsterz ou pour les non initiés, des Muslimhipsters.
- L’influenceuse marocaine garde ses lunettes de soleil en toute circonstance, même en intérieur. Hors de question de se les mettre sur la tête, ça abimerait le brushing. Hors de question de ne pas les porter, il faut bien afficher une marque de plus. Et puis en plus, paraît que ça donne un air mystérieux, et donc important, et donc ultra followable…
- L’influenceuse marocaine se dit blogueuse sauf qu’elle n’a pas de blog. Trop fatiguant un blog, il faut écrire… Et pourquoi écrire puisque plus personne ne lit ? Sauf vous, qui en êtes déjà à ce 9ème point !
- Avant d’être instagrameuse, elle était responsable commerciale ou marketing et se faisait chier comme un rat mort dans cette entreprise où on essayait à chaque fois de lui sucrer ses primes et ses bonus. Du coup elle a compris le truc. Assurer le rendez-vous client avec la casquette de sa boîte et vendre ses services d’influenceuse sous le manteau. Un contrat signé pour le patron, un post rémunéré pour bibi… Whatselse ?