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Après sa vidéo «Le violeur, c’est toi!», Khadija Tnana réagit aux moqueries

L’artiste peintre, autrice d’une vidéo reprenant l’hymne féministe «Le violeur, c’est toi!» répond à ses détraqueurs. Entre combat féministe et déphasage de la société, elle se confie à H24 Info.

Sa vidéo avait fait le tour des réseaux sociaux et a, pour le moins qu’on puisse dire, divisé les internautes. Yeux bandés, une dizaine de femmes, guidées par Khadija Tnana, scandent «Le violeur, c’est toi !», reprenant, avec quelques modifications, l’hymne lancé par des Chiliennes et repris depuis par des milliers de femmes à travers le monde.

L’instigatrice du mouvement «La dynamique de mon corps , c’est ma liberté», explique à H24 Info que l’idée était de «sensibiliser les gens dans un contexte mouvementé par des cas comme celui de Hajar Raissouini, ou d’autres qui voient leurs libertés individuelles bafouées».

«Nous avons eu l’idée de cette vidéo avec cet hymne, car parmi les pays arabes, seuls le Liban et la Tunisie l’ont repris. Et malheureusement, le Maroc figure parmi les pays arabes où l’on dénombre le plus de viols. C’était donc pour nous une nécessité de le reprendre», affirme-t-elle.

A travers cette initiative, Khadija Tnana souhaitait «voir des hommes et des femmes se rallier à ce mouvement et chanter en chœur cet hymne». Cependant, un tout autre accueil a été réservé à cette vidéo tournée à la va-vite, confesse notre interlocutrice. Parmi les attaques formulées par des internautes sur sa page Facebook, des insultes et des phrases pour le moins douteuses: «Cette vidéo incite au viol» ou «Elles ne récoltent que ce qu’elles sèment» .

Une jeunesse abandonnée

Khadija voyait pourtant les choses en grand: «J’avais proposé deux actions, tout d’abord une grande performance artistique pour le 8 mars et puis la reproduction de cet hymne. Mais, nous n’avions pas assez de moyens et on nous nous sommes rabattues sur ce chant».

La militante, également artiste peintre, confie avoir fait face à de nombreuses difficultés. «Au départ, beaucoup étaient très motivées à cette idée, puis nous avons eu beaucoup de désistements et avec les volontaires, nous n’avons eu que quelques répétitions», souligne-t-elle.

Elle admet que «la forme n’était pas vendeuse, le but étant d’avoir des réactions sur le fond». «On nous a attaquées et agressées verbalement et c’était totalement gratuit, et indignes de s’en prendre à nous de cette façon, mais on s’est retenues et on n’a pas voulu leur répondre», affirme-t-elle.

«Au contraire, j’ai ressenti de la pitié pour ces gens qui sont les victimes d’un système et d’un déphasage entre classes sociales. Cette jeunesse est aussi victime d’un abandon de la part de tous, car seule la rue les a éduqués».

Une société pas assez engagée

Et de se rappeler le bon vieux temps où les relations étaient plus pacifiées. «Durant les années 1950 et 1960, j’ai vécu dans un Maroc où nous avions une marge de liberté et où les femmes militaient dans des partis politiques ou des associations, pour leurs droits. Et c’est grâce à cette génération que nous jouissons de certains acquis», affirme la septuagénaire qui a également été vice-adjointe au maire de Fès durant neuf années.

Selon Khadija Tnana, «ces acquis sont menacées aujourd’hui par ce courant islamique et cet islam politique qui essaye de nous les arracher». Mais au delà de cette idéologie qui met à mal nos libertés, c’est aussi «un manque d’engagement de la part de notre jeunesse», reproche notre interlocutrice.

«La majorité des jeunes aujourd’hui sont beaucoup moins motivés et c’est la faute aux politiques qui ont laissés tomber. Ils manquent de valeurs, ils n’ont hérité ni des valeurs traditionnelles ni les valeurs actuelles de la modernité, sauf peut-être dans la forme», soutient Khadija Tnana.

Pour en revenir à cette vidéo, Khadija affirme avoir voulu que ce soit un message pour tous hommes et femmes et surtout pour les plus jeunes d’entre eux. «Quand nous scandons “Le violeur, c’est toi”, on pense à toutes les formes de viol. Et moi je pense justement qu’on a violé le droit de ces jeunes qui sont maintenant perdus, car nous voyons que nous sommes arrivés à un point très bas et de quasi non-retour avec notre société».

 

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