Mort de Jean Rochefort : album-souvenir (DIAPORAMA)

Des bacchantes, un flegme tout britannique, un goût du verbe et de la bagatelle, un certain swag aussi (big up Madame Bovary de Gustave Flaubert), Jean Rochefort était une figure magnifique de la comédie, un « boloss » d’une malice déconcertante au capital sympathie aussi immense que son sourire. Il nous a quittés dans la nuit du 8 octobre, à l’âge de 87 ans. Photos.

 

 

Les petites joies enlevées par la vieillesse « nourrissaient son désir de mourir ».

 

Privé de mémoire, d’alcool et « d’érections », l’acteur, hospitalisé en août dernier, s’est éteint le 9 octobre dans un établissement parisien. Amoureux des chevaux -au point de concéder quelques navets parmi ses 150 films pour « gagner de l’avoine », Jean Rochefort avouait à La Nouvelle République, en 2015 avoir un peu trop décliné une de ses autres passions : « celle que m’inspire le beau sexe. C’est une passion souvent onéreuse : trois pensions alimentaires c’est un sacré investissement. Je me suis marié une première fois à Varsovie pour arracher une fille de ministre au communisme. Je me suis pris pour Don Quichotte. Nous avons eu deux enfants. Puis il y a eu Nicole (Garcia) et notre fils Pierre », avant d’ajouter s’être rangé des fiacres et de ses anciennes frasques.

 

 

« À présent, ça fait trente ans que je suis marié et fidèle », revendiquait ce moustachu drôlatique, resté jusqu’à son dernier souffle auprès de sa dernière épouse Françoise Vidal, architecte de vingt ans sa cadette, excel­lente cava­lière d’obstacles, et maman de Louise (née en 1990) et Clémence (née en 1992).

 

 

 

Jean Rochefort a rendu l’âme et le vide est gigantesque, à l’instar de son talent.

 

 

Jean Rochefort a failli ne jamais apparaître sur nos écrans. Adolescent, ses parents l’imaginent comptable : « Inadapté à la vie pratique, je n’ai jamais eu le moindre sens de la débrouillardise. Il me semble que cette nullité pour m’accommoder du quotidien a été un heureux hasard qui m’a aidé à aller vers la fiction« , confiait-il à Paris Match. À 19 ans, il occupe les bancs du Conservatoire national supérieur d’art dramatique où il rencontre une bande de joyeux lurons : Annie Girardot, Claude Rich ou encore Jean-Pierre Marielle et Jean-Paul Belmondo, grâce à qui il est révélé en 1961 par un second rôle dans Cartouche.

 

 

 

Eleveur de chevaux, lorsqu’Yves Robert lui apporte le scénario d’Un éléphant ça trompe énormément, le facétieux acteur est en train de remuer du fumier. Il rappelle le réalisateur le soir même, emballé : « Non seulement c’est un chef-d’œuvre, mais c’est un chef-d’œuvre d’humanisme. » Le film, qui sort en 1976, confirme son statut d’acteur.

 

 

Puis, c’est la consécration. Il obtient le césar du meilleur acteur pour son rôle dans Le Crabe tambour, dans lequel il incarne un officier de la Marine atteint d’un cancer au poumon. « Je suis parti en boudant sur ce navire de guerre immense, […] par un temps apocalyptique, portant l’uniforme jour et nuit au cas où il y aurait un plan à filmer. Ces conditions, ce confinement, ont fait que ce n’était plus un film mais autre chose: un chef-d’œuvre », confiait-il au Figaro.

 

 

 

Breton dans l’âme, le comédien qui a passé sa jeunesse à Dinan a tourné plusieurs fois dans la région de son cœur avec L’horloger de Saint-Paul, Cher inconnu ou encore Le cavaleur. Après avoir gagné ses galons dans le milieu du cinéma, en 2000, c’est le drame. Sur le tournage de L’homme qui a tué Don Quichotte, une violente hernie l’oblige à rester alité pendant de longs mois, il se réfugie dans son Haras de Villequoy où une centaine de poulains baptisés d’après des noms de films ont vu le jour. Un homme « de spectacle et de cheval« , comme il se surnomme dans un entretien au Monde.

 

 

 

Passionné d’équitation, mais pas seulement, le comédien est un amoureux de littérature. Il s’est récemment illustré dans Les boloss des belles lettres, une série de vidéos où il aborde les classiques de la littérature en langage « djeuns ». « Rester le plus longtemps possible merveilleusement con et merveilleusement gamin« déclarait-il au micro d‘Europe 1, en 2013. Une philosophie de vie qu’il a gardé jusqu’à la fin.