Michelle Rodriguez en a fini avec la bagarre et les courses-poursuites. A 39 ans, l’actrice de « Fast and Furious » prend un virage radical, direction son côté féminin. Confidences de la plus badass des stars hollywoodiennes, au lendemain de son hommage au Festival du Cinéma Américain de Deauville.
Au cours de votre hommage, vous avez dit que la guerrière masculine en vous avait rendu les armes. Qu’est-ce que vous entendez par là ?
Michelle Rodriguez : Je ne veux plus me battre physiquement. Je suis à un point de ma carrière où je n’évolue plus. Il me faut un changement drastique. J’ai réalisé ça après avoir joué un homme dans Revenge. Pour la première fois de ma carrière, je me suis sentie comme une femme qui joue le rôle de la masculinité et j’ai voulu explorer ce sentiment. Quand Widows, le projet de Steve Mcqueen, est arrivé, j’étais effrayée. Incarner une femme mariée, sans ambition, avec des enfants ? Berk ! Et puis je me suis dit que j’avais quelque chose à en apprendre. Je ne me suis pas trompée. Ce film est le point de départ de mon nouveau voyage.
Peut-on dire que votre prochain challenge sera d’accepter votre féminité ?
Oui et de trouver ça beau. Qu’est ce qui me frustre dans l’idée d’être une femme mariée sans ambition ? C’est ce qu’est ma mère et pourtant je l’aime. Je dois trouver d’ou vient cette colère contre la féminité, pourquoi ça me met mal à l’aise. Serait-ce l’idée que la société s’en fait que je n’aime pas ? Ou mes propres pensées ?
Vous êtes la preuve que les femmes peuvent se bagarrer, manier des armes, piloter des vaisseaux, conduire très vite… Jouer des rôles soit-disant réservés aux hommes, c’est votre manière de vous battre pour les droits des femmes ?
J’ai le sentiment d’avoir été une voix pour les garçons manqués, pour ces filles qui rêvent d’indépendance et de liberté dans le sens physique du terme. Ma carrière a été bâtie sur cet archétype de la nana qui vit dans une ferme aux Etats-Unis, qui aime s’entraîner au tir avec ses cousins et qui ne veut pas se marier ni avoir d’enfant. Sur cette femme qui saute des avions et veut faire carrière en enfourchant des motos, sur cette femme qui aime conduire très vite parce que c’est sa manière de se sentir libre, sur cette femme qui veut rejoindre l’armée pour représenter son pays et servir une cause. Elles existent toutes et pourtant, elles n’étaient pas représentées. J’ai voulu être leur porte-parole. Maintenant que j’y suis parvenu, il est temps que je passe à autre chose.
Etes-vous fière d’être un modèle ?
Oula, je ne suis pas un modèle ! J’ai eu mes moments tumultueux. Dans ma toute première interview, je me souviens avoir dit « ne m’admirez pas, parce que je vais sortir de cette pièce et faire des bêtises« . Je ne souhaite à personne de commettre les mêmes erreurs que moi. Même si j’ai le sentiment d’avoir réussi à atteindre l’objectif que je m’étais fixé : être moi-même et ne pas laisser les autres m’abattre.
Qui vous a inspirée quand vous étiez plus jeune ?
Que des hommes, des stars de films d’action. Les femmes n’étaient pas nombreuses dans cette catégorie, mais il y avait Sigourney Weaver, Wonder Woman et Bionic Woman… J’ai grandi dans les années 80 qui étaient macho. Les nineties l’étaient aussi. C’était difficile d’entendre la voix des femmes à l’époque. On réalise seulement maintenant qu’il existe un mélange de masculin et de féminin. Angelina Jolie ou Johnny Depp, je les vois à la fois homme et femme. Comme moi. Je me suis toujours sentie entre les deux et j’ai voulu évoluer pour me trouver réellement. J’ai compris que je ne trouverai pas mon équilibre tant que je n’aurai pas embrassé mon côté féminin.
Avez-vous le sentiment qu’on est en train de sortir de ces cases et d’enfin mieux représenter les femmes à l’écran ?
Oui, en grande partie grâce à Disney et des films comme La Reine des Neiges ou Rebelle. Donner aux enfants des images d’indépendance libérera les femmes. Les hommes doivent se mettre en retrait, arrêter de donner leur opinion. Taisez-vous un peu (rires) ! Laissez-nous faire notre truc, laissez-nous voir ce que l’union peut nous apporter, laissez-nous manifester en notre nom et dire ce qui nous préoccupe. Les hommes nous ont toujours dicté quoi faire et qui être, via les livres, l’art, les films… Il est temps de nous en préoccuper nous-même.