Des rituels porte-bonheur, nous en avons toutes un ou deux sous la main pour « surmonter » la journée et attirer le positif. Passage à la loupe de ces gestes doudous.
Parce qu’elles nous rassurent ou sont profondément ancrées dans nos souvenirs d’enfants, certaines superstitions finissent par devenir parts de nous-mêmes. Ce foulard offert par une grand-mère affectueuse, ce parfum fétiche porté lors des rencontres amoureuses, cette phrase «magique» prononcée avant une épreuve majeure (…), il y en a une pléthore et une fois suffit pour décider dans nos têtes que tels accessoires ou tels réflexes sont des passerelles vers une forme de bénédiction.
« Je m’habille toujours en bleu ciel quand je dois me rendre à un rendez-vous professionnel. Je portais un chemisier de cette couleur le jour où j’ai décroché mon premier emploi. Depuis j’associe le bleu ciel au succès» explique Kenza B. Attachée à sa couleur, la jeune femme ne se trouve pas particulièrement superstitieuse, mais le réflexe chromatique demeure pourtant bien imbriqué dans ses pensées.
Pour Merième A, prononcer une phrase précise le matin avant de sortir de chez elle lui porterait chance. « J’ai rencontré une dame à Paris un jour qui m’a confié sa formule. C’était joli à entendre et ça rimait alors je l’ai adoptée. Cette phrase me laisse penser que de belles choses vont se produire».
A chacune son truc et il faut apparemment y voir quelques réminiscences de la période pré-religieuse. « De petites choses nous sont restées, sans nous engager totalement dans la superstition en tant que fil conducteur. Nous pouvons y mettre de l’émotion, de l’amour et c’est justement ce qui va nous amener à croire qu’un médaillon gravé au nom d’un être cher aura un impact positif sur les évènements » nous dit Bernard Corbel, psychologue.
Plus en accord avec notre ère, ces habitudes inoffensives et limite mignonnes ont remplacé les gestes dramatiques d’antan. « Nous avons adapté ces rituels à l’époque actuelle mais aussi à notre développement culturel. Leur impact sur nous a aussi été réduit, à présent ils ont principalement pour mission de calmer, de redonner confiance voire d’apaiser au moment d’une prise de parole » affirme Imane Haddouche, coach de vie.
Utile jusqu’à quel point ?
L’effet de ces croyances est davantage psychologique que mystique. Tenir à un objet, à une couleur ou à une phrase apporte surtout du réconfort aux personnes concernées. Elles ont ainsi l’impression de mettre plus de chances de leur côté et de s’envelopper de bonnes ondes.
« Les jours d’examens mon père était le seul à pouvoir me déposer au lycée et j’ai gardé le même stylo à encre de la 6ème à la terminale parce que je le liais à mes bonnes notes. A la Fac pendant les préparations je mettais un point d’honneur à ne traiter que les épreuves de première session. Je pensais que bucher sur les sujets de rattrapage entrainait forcément l’échec », se souvient Radia L. Aujourd’hui cette cadre de banque a troqué ses anciens symboles contre de nouveaux. « Mes escarpins noirs de conquérante et mon bloc note en cuir customisé ». Autre âge, autres grigris !
« Tant que cela fait du bien et permet de se sentir sereine, c’est que c’est utile. Voyons-le comme un ancrage positif à même de donner une énergie. Le problème se pose lorsque nous oublions que nous sommes à l’origine dudit cérémonial et lui donnons plus d’importance qu’il n’en faut » prévient la coach de vie.
S’attacher déraisonnablement à une superstition aussi mineure soit-elle, devient alors limitant. La dynamique des choses est faussée et le côté sympathique finit par céder la place à un délire obsessionnel. « Il faut veiller à ne pas glisser vers des pratiques négatives car de l’utile au péril, il n’y a parfois qu’un pas » conclut Bernard Corbel.