Et si la mode était altruiste ? Fadela Bennani ne lâche pas l’engagement social d’une semelle. Avec Amaz – amour en portugais – elle lance des sneakers qui mêlent détails beldi, allures citadines et démarche consciente. Ainsi, au-delà d’une esthétique originale, la griffe reverse une partie de ses revenus pour contribuer à scolariser les jeunes filles du Haut-Atlas. Rencontre avec une créatrice bien dans ses baskets.
Qui êtes-vous ?
Je m’appelle Fadela Bennani et je vis à Casablanca. Je suis fondatrice de la marque de sneakers marocaines éthiques et artisanales Amaz. Je suis mariée et maman d’une fille de 3 ans.
Êtes-vous formée aux métiers de la couture ou de la chaussure ?
Absolument pas, je suis une autodidacte de la création. Je suis diplômée d’une grande école de commerce et j’ai travaillé dans le conseil en stratégie et dans le e-commerce avant de me lancer dans cette aventure entrepreneuriale créative.
Comment vous est venue l’idée d’AMAZ ?
La naissance de ma fille a été source de questionnement sur le sens de ma vie professionnelle à l’époque. J’étais salariée et je travaillais beaucoup sans véritablement trouver du sens à ce que je faisais. Est alors venue la volonté de créer un projet porteur de sens qui correspondrait à mes valeurs. La création de Amaz m’a permis de réaliser un rêve, celui de créer des sneakers élégantes avec une touche artisanale marocaine, de valoriser le savoir-faire ancestral des artisans marocains et de soutenir la filière de la chaussure marocaine, de contribuer à mon échelle à améliorer l’accès à l’éducation des filles dans les régions enclavées du Maroc, de créer une marque vegan et éco-consciente, n’utilisant pas de matière d’origine animale ni d’emballage en carton ou en plastique. L’emballage de chaque paire est un tote bag en tissu écru réutilisable. Amaz provient du terme « Amazigh » qui signifie berbère. Amaz renvoie également à l’amour en portugais, car Amaz prône ça.
Pourquoi les sneakers ?
Je suis une fan inconditionnelle de sneakers depuis mon adolescence. J’adore leur côté pratique et confortable… c’est devenu un accessoire mode et esthétique.
Faut-il à tout prix moderniser le beldi ou l’artisanat ?
Je pense que la meilleure façon de préserver notre patrimoine est de l’adapter aux tendances contemporaines pour qu’il puisse perdurer. Toutefois, dans mon cas, je ne suis pas dans une logique de modernisation de l’artisanat mais plus dans une logique d’intégration de l’artisanat à un accessoire qui incarne la modernité urbaine.
Combien de temps pour produire une paire ? Combien de « mains » sont sollicitées ?
Les sneakers Amaz sont faites à la main dans un petit atelier artisanal de la région de Casablanca. Au total, cinq personnes sont sollicitées pour chacune des étapes de la fabrication, de la coupe au montage des sneakers. Chaque paire requiert en moyenne 30 minutes de travail.
Quelle est votre stratégie commerciale ?
Amaz a connu du succès depuis son lancement grâce aux réseaux sociaux et au pouvoir d’internet. Je distribue pour l’instant en ligne au Maroc et à l’international grâce à mon e-store. J’ai également un showroom à Casablanca pour les clientes qui veulent voir et essayer. Je rejoins régulièrement aussi des pop-up stores de créateurs au Maroc mais également à l’étranger. L’objectif en 2018 est de distribuer les sneakers Amaz dans des concept stores dans les principales villes du Maroc et également en Europe.
Quelles sont les valeurs d’AMAZ ?
AMAZ prône la solidarité comme valeur fondamentale. Le principe du « give back » m’est cher, faire du business ? Ok… mais tout en aidant les autres. Je dirais également qu’Amaz est une marque authentique, car je fais les choses avec sincérité et amour.
Comment venez-vous en aide aux jeunes filles du Haut Atlas ?
AMAZ est un projet solidaire à travers le programme Amaz for Education qui a pour objectif de contribuer à améliorer l’accès à l’éducation des filles dans les régions reculées du Haut Atlas marocain. En partenariat avec l’ONG Education For All, pour chaque paire d’Amaz vendue, nous finançons un jour de pensionnat pour une fille scolarisée dans le secondaire. L’ONG Education for All construit et gère depuis 10 ans pas moins de cinq internats dans la région du Toubkal pour que les jeunes filles puissent continuer à être scolarisées en secondaire. Les internats sont proches des collèges et lycées publics contrairement à leurs domiciles qui sont souvent très loin. Dans les internats, elles sont logées, nourries, blanchies et encadrées dans leur scolarité pour leur assurer un avenir meilleur. Ce sont aujourd’hui 180 fillettes de la région qui en bénéficient.
Pourquoi le Haut-Atlas en particulier ?
Je cherchais à œuvrer en faveur d’un meilleur accès à l’éducation des filles dans les zones rurales de notre pays et il se trouve que l’association Education for All fait un travail formidable dans la région du Haut-Atlas.
Quels sont vos projets en cours et futurs ?
Je travaille actuellement sur une collection des sneakers pour hommes. L’étape d’après serait d’en faire pour les enfants.
Quelle paire d’Amaz pour aller au bureau ? Et pour un date ?
Je dirais les Terz noires pour aller au bureau et les Mozouna noir mordoré pour un date.
Le mot de la fin ?
Je dirais qu’il ne faut pas avoir peur d’écouter son intuition et de croire en ses rêves. Avec de la persévérance, tout est possible.