Société

Avec #WhereIsMyName, les Afghanes luttent pour leur prénom

En Afghanistan, les femmes se mobilisent sous le hashtag #whereismyname afin de se faire appeler par le prénom et de se réapproprier leur identité.

 

 

« Nous essayons de prendre en main nos identités et de les libérer » explique Bahar Sohaili. Cette activiste et écrivaine a initié une campagne sur les réseaux sociaux suivie par des centaines de femmes en Afghanistan.

 

 

L’objectif ? Revendiquer leur volonté d’être appelée par leur prénom en utilisant le hashtag #whereismyname (où est mon prénom).

 

 
« Mère de mes enfants », « mon foyer » ou même « ma chèvre » : dans la société patriarcale afghane, beaucoup d’hommes appellent leur femme ainsi. Le prénom de leur épouse est effacé, inconnu, inexistant. Il ne doit pas être révélé, même sur sa tombe après sa mort. À la place, il est souvent précisé « mère de », « fille de » ou « sœur de », suivi du prénom d’un homme.

 

 

 

Sur les invitations de mariage, l’identité de la femme n’est pas mentionnée non plus. « Selon la logique tribale, le corps d’une femme appartient à un homme, les autres ne devraient pas en disposer, même en la regardant. De même, le prénom de la femme appartient à l’homme« , explique au New York Times Hassan Rizayee, un sociologue afghan.

Batool Mohammadi, une des activistes de la campagne, se souvient du moment où elle a pris conscience de la gravité de la situation : « Je suis allée au bureau d’une banque privée pour remplir un formulaire. Quand le manager m’a demandé le prénom de ma mère, j’ai marqué une pause, parce qu’en fait j’avais oublié le prénom de ma mère. Toutes ces années, personne n’avait demandé son prénom ou ne l’avait appelée par son prénom. »

 

 

 

Une bataille pour l’identité

 

 

 

Le mouvement #WhereIsMyName a commencé par la publication de quelques posts courageux sur Twitter et Instagram : « Ne soyez pas timide lorsque vous donnez le prénom de votre mère« , « Mon prénom est mon identité. Je veux la clamer haut et fort !« .

 

 
Puis, le mouvement a rapidement pris de l’ampleur, jusqu’à être relayé dans les médias nationaux et internationaux. Des personnalités publiques comme des journalistes ou actrices afghanes ont pris part à la campagne.

 

 
Certains hommes ont même exprimé leur soutien, comme le chanteur Farhad Darya, très populaire en Afghanistan. Il a posté une photo où il apparaît au côté de sa mère, qu’il a légendé : « Farhad et Sultana Darya« .

 

 
À chaque révolution ses détracteurs. Des voix se sont élevées pour contrer cette initiative, comme cet utilisateur qui écrit sur Twitter : « Je m’appelle Akram. Le prénom de Mère de Mes Enfants ? Je ne le dirai pas même si je dois être coupé en morceaux. »

 

 

Entre progrès et reculs

 

 

Malgré les obstacles, Bahar Sohaili ne veut pas se laisser abattre. Grâce à cette campagne, la jeune femme espère briser les tabous et faire prendre conscience aux afghanes de leur valeur. Elle est plutôt confiante, les droits des femmes ont réellement évolué dans le pays. Certaines parviennent bel et bien à s’imposer dans des positions de pouvoir. En Afghanistan, 27. 7% des députés sont des femmes, un taux supérieur à la moyenne mondiale de 21.7 %.

 

 

 

Mais la route est encore longue pour ces femmes qui voient régulièrement leurs droits bafoués. Le taux de suicide des Afghanes a particulièrement augmenté ces dernières années, notamment à cause du phénomène des mariages forcés qui fait rage dans le pays. Permettre aux femmes d’avoir une réelle identité pourrait contribuer à l’amélioration de leur sort.

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