Société

Coronavirus : Écran et éducation, ce n’est pas si facile…

Cours à la télévision pour les enfants libyens ou sur tablettes dans les riches émirats du Golfe: dans le monde arabe, chaque pays tente de trouver des alternatives pour des millions d’élèves privés d’écoles, au titre de la prévention du nouveau coronavirus.

Du Maroc au Qatar en passant par la Jordanie, enseignants, parents et élèves sont parfois livrés à eux-mêmes pour rattraper les cours et ne pas connaître une année scolaire blanche, avec des accès souvent très inégaux à internet.

Dans les pays secoués par les conflits et l’instabilité, comme la Libye ou l’Irak, la tâche est encore plus ardue, faute de moyens de télécommunications adéquats, avec le risque de voir davantage d’enfants privés d’enseignement.

Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, un enfant sur cinq n’est déjà pas scolarisé. D’après un récent rapport de l’Unicef, quelque 63% des enfants au Moyen-Orient ne peuvent pas lire et comprendre un texte simple à 10 ans.

En outre, toujours selon l’agence onusienne, plus de trois millions sont privés d’école du fait des crises. Et en Syrie, Irak, Libye et Yémen, plus de 8.850 établissements ont été détruits ces dernières années.

Face à la fermeture des écoles en lien avec la pandémie du Covid-19, la Libye tente ainsi de limiter une nouvelle aggravation.

A ce titre, un accord a été conclu entre le ministère de l’Enseignement et plusieurs TV locales pour la diffusion hebdomadaire de cours d’anglais, de statistiques et de sciences pour les diplômes de fin d’études moyennes (brevet) et secondaires (baccalauréat).

Ces cours, enregistrés au siège du ministère, sont « obligatoires pour tous les élèves et tous les niveaux », a déclaré le ministère.

Accessibles sur différentes plateformes, « c’est comme si l’élève se trouvait dans la classe avec ses camarades et son enseignant », a argué le ministre de l’Education, Mohamad Amari Zayed.

« Les enfants ne sont pas en vacances », insiste de son côté Mahdi al-Naami, professeur d’histoire-géographie dans un lycée à Tripoli. « Ils doivent travailler à la maison et c’est la responsabilité des parents de faire en sorte qu’ils le fassent. »

Pas évident, note toutefois Salima Abdel Aziz, employée dans une banque de Tripoli. « Ce sont les mères, de façon générale, qui s’occupent des leçons à la maison », dit-elle à l’AFP.

« Pas facile! »

En Jordanie, où un couvre-feu a été décrété, une chaîne TV dédiée au sport a changé temporairement de vocation, donnant des cours aux écoliers.

Pour le reste, dans ce pays où la quasi totalité de la population a accès à internet, des établissements envoient des cours, reçoivent les devoirs et retournent les corrigés via WhatsApp.

Mais « ce n’est pas facile du tout! », assure Saif Hindawi, 40 ans. « Ce système est nouveau. Il faudra du temps pour s’adapter », explique ce père de quatre filles.

« Ca ne sera jamais comme les leçons à l’école où les élèves peuvent poser des questions et interagir avec les enseignants », note-t-il.

Pour trois de ses filles, M. Hindawi dit recevoir tous les cours sur son téléphone: « Je les partage avec mon épouse et nous essayons, tous les deux, de les expliquer (mais) c’est compliqué car je ne les comprends pas toujours ».

En Irak, « lorsque les autorités ont annoncé la fermeture des écoles, le ministère de l’Education nous a demandé de trouver des moyens d’enseigner électroniquement », explique Haneen Farouq, professeure dans le domaine médical.

« Au collège privé où j’enseigne, nous utilisons (l’application) Google Classroom pour télécharger les leçons de chaque jour en format PDF », précise-t-elle.

Mais après des mois de manifestations contre le gouvernement, le virus a été un nouveau coup pour les élèves, déplore Mme Farouq. « Ils ne sont pas du tout motivés » et « il y a de grandes chances que nous devions tout reprendre quand les écoles rouvriront ».

« Enrichi chaque jour »

Au Maroc, pays qui compte huit millions d’élèves, des cours sont diffusés sur une chaine publique et accessible sur une plateforme numérique du ministère de l’Education.

« Le contenu est enrichi quotidiennement », affirme une source au ministère, selon qui 1,2 million d’élèves y accèdent chaque jour ».

Mais la télévision « reste le principal outil d’enseignement à distance pour les familles qui n’ont pas d’ordinateurs », avance un enseignant d’une école rurale près de Marrakech (sud).

En Egypte, pays le plus peuplé du monde arabe où moins de la moité de la population a accès à internet, le ministère de l’Education a également annoncé le recours prochain à la télévision pour dispenser des cours.

L’enseignement public en Egypte compte quelque 22 millions d’élèves, d’après le ministère, qui a ouvert la semaine dernière une plateforme de cours en ligne.

En Cisjordanie occupée, des enseignants utilisent l’application de visioconférence « Zoom » pour enseigner à plus de 100 étudiants à la fois.

Dans les pays du Golfe, où les réseaux de télécommunications sont les plus développés, les cours à distance sont déjà accessibles à tous ou presque, comme au Qatar, où les établissements disposent de plateformes virtuelles.

Aux Emirats, l’enseignement à distance est aussi mis en valeur. Le pays a annoncé que l’Unesco avait reconnu comme « fiable » le site éducatif « madrasa.org », créé par une fondation émiratie et « disponible gratuitement pour plus de 50 millions d’écoliers arabes », selon le ministère.

En Algérie et en Tunisie, la fermeture des écoles a coïncidé avec les vacances scolaires. Jusqu’à présent, ces deux pays n’ont prévu aucune mesure d’e-learning.

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