La semaine dernière, le Maroc était choqué par la publication d’une vidéo sur les réseaux sociaux de jeunes agressant une jeune femme dans un bus. Ces images choquantes ont fait le tour de la toile. Quatre ou cinq adolescents ont agressé sexuellement une jeune femme nommée « Zineb » , agée de 24 ans, dans un bus en marche tout en filmant leur acte et sans cacher leurs visages.
La vidéo devenue virale a suscité beaucoup d’interrogations de la part des internautes. Même si les agresseurs ont été arrêtes, la population marocaine n’a pas hésité à sortir dans les rues pour condamner cet acte indignant.
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Le célèbre écrivain marocain Abdellah Taïa s’est également exprimé à ce sujet en remerciant les femmes à travers son statut Facebook du Jeudi 24 Août qui a été partagé plus de 1700 fois ..
Voici le contenu intégral de sa publication:
« Merci aux femmes marocaines. Le viol de Zineb dans un bus de Casablanca, sans que personne n’intervienne pour la sauver, m’a choqué moi aussi. Atristé. Anéanti. Donné envie de vomir. De pleurer. Les femmes marocaines ne méritent pas le mépris avec lequel ce pays ingrat les traite depuis si longtemps. Ce sont elles qui portent les familles. Elles qui se sacrifient. Elles qu’on surveille le plus et qu’on viole le plus. Et cela ne se passe pas que dans les busCela se passe surtout dans les maisons, dans les foyers. En tant qu’homme marocain, je suis bien placé pour témoigner, pour dire tout le mal qu’on leur fait, comment on s’acharne sur elles et comment on fait tout pour casser leurs ambitions, leurs rêves. Comment on les rabaisse en les emprisonnant dans des traditions assassines et des morales d’un autre temps… Je dois tout à ma mère M’Barka Allali: durant des années, cette femme analphabète, pauvre, m’a sans cesse poussé à étudier, à m’élever. Elle économisait chaque jour six Dirhams pour me permettre de payer le bus qui m’emmenait à Rabat, à l’université Mohamed V. C’est elle qui m’a appris à ne pas renoncer, à me battrer, à crier. A être plus malin que les autres, les ennemis si nombreux. Je suis d’abord et avant tout le fils de M’Barka et de son système de survie. Mes soeurs aussi m’ont toujours impressionné par leur courage et leur détermination. Et pourtant: la société marocaine a été atroce avec ces femmes. Atroce. Atroce avec tant de femmes marocaines. Les violeurs ne sont pas seulement ces pauvres adolescents tellement perdus qui violent Zineb dans le bus. Les violeurs, ce sont ces hommes marocains qui font à tous les niveaux de la société la loi et qui ne veulent pas changer de mentalité et encore moins les règles injustes de l’héritage. Les violeurs sont si nombreux. Et j’ai peur que malheureusement, dans une semaine ou deux, le Maroc passe à une autre affaire qui fait le buzz. Les femmes seront encore oubliées. Jusqu’à quand? Jusqu’à quand? Merci aux femmes marocaines. Merci à ma mère. Merci à mes soeurs. Admiration et vénération sincères pour elles toutes… Salam chaleureux, tendre, à elles et à vous tou-te-s… » Abdellah Taïa
Abdellah Taïa, né le 8 août 1973 à Salé au Maroc, est un écrivain marocain d’expression française. Il est l’un des premiers écrivains marocains et arabes à affirmer publiquement, dans ses livres comme dans les médias, son homosexualité à travers ses récits autobiographiques. Dans son pays, selon la loi, l’homosexualité est un crime grave, passible de prison. Il a grandi dans un quartier populaire entre Salé et Rabat où son père est employé dans une bibliothèque, mais sa mère ne sait ni lire ni écrire.