Des Saoudiennes viennent de lancer un mouvement de protestation contre le port de l’abaya en postant sur les réseaux sociaux des photos où elles portent ce vêtement à l’envers.
L’Arabie saoudite est l’un des pays les plus conservateurs concernant les femmes, qui sont notamment tenues de porter en public ce vêtement habituellement noir et qui couvre presque totalement le corps.
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Le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane a déclaré en mars dernier que le port de l’abaya n’était pas obligatoire dans l’islam. Mais dans la pratique, rien n’a changé sur ce point en Arabie saoudite et aucune décision officielle à ce sujet n’a été publiée.
Utilisant le hashtag « abaya à l’envers« , des dizaines de Saoudiennes ont publié des photos d’abayas retournées.
« Parce que les féministes saoudiennes ont une créativité sans limites, elles ont inventé une nouvelle forme de protestation« , a tweeté cette semaine l’activiste Nora Abdulkarim.
‘Using the hashtag “inside-out abaya”, dozens of women have posted pictures of flipped robes in a rare protest against the strict dress code.’ @AFP https://t.co/UERdqGgnpq
— Ola Salem (@Ola_Salem) 17 novembre 2018
« Elles postent des photos (d’elles-mêmes) portant leur abaya à l’envers comme une protestation contre la pression qui les oblige à la porter« , a-t-elle expliqué.
Une autre femme a déclaré sur Twitter que la campagne en ligne, qui semble prendre de l’ampleur après avoir été lancée cette semaine, était un acte de « protestation civile ».
Lors d’une interview accordée en mars à la chaîne de télévision américaine CBS, le prince héritier a déclaré: « les lois sont très claires, il est stipulé dans la charia: que les femmes doivent porter des vêtements décents et respectueux, comme les hommes ».
Mais cela « ne désigne pas particulièrement une abaya noire« , a ajouté le prince. « Il est entièrement laissé à la femme de décider quel type d’habillement décent et respectueux elle va porter ».
Après l’intervention du prince Mohammed ben Salmane, un important dignitaire musulman, le cheikh Ahmed ben Kassim al-Ghamdi, a pesé dans le débat en s’inscrivant en faux contre l’idée très répandue selon laquelle le noir serait la seule couleur admissible selon l’islam pour les abayas.
Le prince Mohammed ben Salmane, actuellement en butte aux critiques dans l’affaire du meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, a lancé auparavant un processus de libéralisation dans le royaume conservateur.
En juin, l’interdiction faite aux femmes de prendre le volant – en vigueur depuis plusieurs décennies – a été levée. Le royaume a également autorisé les femmes à pénétrer dans les stades, des enceintes jusqu’ici réservées aux hommes, et veut encourager la féminisation de la main-d’oeuvre, alors qu’il cherche à diversifier une économie fondée sur le pétrole.
Mais parallèlement à ces réformes, les arrestations de militantes se sont succédé ces derniers mois dans le royaume, qui intensifie sa répression sur les dissidents.
Le pays est également critiqué pour son système de tutelle masculine, qui permet aux hommes d’exercer une autorité arbitraire pour prendre des décisions au nom des femmes de leur famille.