Sept marques d’implants mammaires, « susceptibles de constituer un danger rare mais grave » de survenue d’un type de cancer chez les femmes qui en portent, pourraient ĂȘtre interdites en France, selon un « projet de dĂ©cision » de l’Agence nationale des produits de santĂ© (ANSM) soumis aux fabricants.
« Aucune dĂ©cision n’a Ă©tĂ© prise Ă ce stade », a toutefois averti le gendarme sanitaire, qui doit rendre « prochainement » sa dĂ©cision officielle sur le sujet.
« Toute information contraire qui pourrait circuler doit ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme fausse et non validĂ©e par l’ANSM », a ajoutĂ© l’organisme.
Dans un courrier aux fabricants datĂ© du 19 mars, la direction des dispositifs mĂ©dicaux de l’ANSM prĂ©pare toutefois le terrain Ă une interdiction de sept marques.
« Au vu des donnĂ©es scientifiques acquises, des donnĂ©es de vigilance nationales, des avis d’experts et recommandations nationales et internationales de professionnels de santĂ©, il apparaĂźt que les implants mammaires Ă enveloppe macro-texturĂ©e ainsi que les implants mammaires recouverts de polyurĂ©thane prĂ©sentent un risque de survenue de LAGC-AIM », le lymphome anaplasique Ă grandes cellules associĂ© au port d’implants mammaires, selon ce courrier dont l’AFP a obtenu une copie.
Aussi, « l’ANSM, s’inscrivant dans une dĂ©marche de rĂ©duction du risque » a « l’intention d’interdire la mise sur le marchĂ© la distribution, la publicitĂ© et l’utilisation » de sept marques d’implants aujourd’hui utilisĂ©s en France, conclut ce « projet de dĂ©cision de police sanitaire ».
Une telle interdiction de l’ensemble des implants dits « macro-texturĂ©s » ainsi que de ceux Ă enveloppe en polyurĂ©thane irait au-delĂ des recommandations du comitĂ© d’expertes rĂ©uni dĂ©but fĂ©vrier par l’ANSM.
Ce comitĂ© se prononçait seulement pour l’interdiction des prothĂšses Biocell du fabricant amĂ©ricain Allergan, principal modĂšle mis en cause dans la survenue de LAGC.
Depuis 2011, 56 cas de cette forme rare de cancer ont Ă©tĂ© recensĂ©s en France chez des femmes porteuses d’implants mammaires, texturĂ©s pour la quasi totalitĂ©. Trois en sont dĂ©cĂ©dĂ©es. Une maladie qui demeure rare, 500.000 femmes portant des implants en France.
Les implants mammaires en silicone sont classifiĂ©s en fonction de l’aspect de la pellicule qui les entoure entre lisses et texturĂ©s (microtexturĂ©s ou macrotexturĂ©s, selon le degrĂ© de rugositĂ©).
En France, les prothĂšses texturĂ©es (macro et micro confondues) reprĂ©sentent 85% du marchĂ©, car elles sont rĂ©putĂ©es rester mieux en place et provoquer moins de « coques » (durcissement des tissus autour de l’implant).
Selon certains scientifiques, les inflammations provoquĂ©es par le frottement pourraient toutefois ĂȘtre Ă l’origine du LAGC.
Une telle interdiction globale serait « dĂ©lĂ©tĂšre pour l’intĂ©rĂȘt des patientes », a rĂ©agi le Dr SĂ©bastien Garson, prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© française des chirurgiens esthĂ©tiques plasticiens (Sofcep), qui craint notamment qu’une telle annonce ne crĂ©e la panique chez les femmes porteuses d’implants des marques concernĂ©es.
Les fabricants disposent de « 8 jours » aprĂšs la rĂ©ception du courrier pour envoyer leurs « observations » Ă l’ANSM, ajoute la lettre.
« En fonction des commentaires que nous recevrons, la dĂ©cision pourrait Ă©voluer », a assurĂ© un responsable de l’ANSM Ă l’une des parties prenantes, dans un courriel que l’AFP a pu consulter.
Les prothĂšses macrotexturĂ©es concernĂ©es sont celles de marque Biocell (du fabricant amĂ©ricain Allergan) – dĂ©jĂ retirĂ©es du marchĂ© en raison de la perte du marquage CE nĂ©cessaire Ă leur commercialisation -, LSA (laboratoire Sebbin), Polytext (Polytech) et Arion, ainsi que les implants Cristalline et Nagotex (groupe GC Aesthetics).
Les implants Ă enveloppe polyurĂ©thane sont ceux de la marque Microthane (Polytech), selon l’annexe du projet de dĂ©cision de l’ANSM.
« Nous allons leur expliquer que nous avons eu zĂ©ro cas (de LAGC) pour la marque Nagor (Nagotex NDLR) et deux cas pour la marque Eurosilicone (Cristalline NDLR), sur le marchĂ© depuis plus de 30 ans », a dĂ©clarĂ© Ă l’AFP Carlos Reis Pinto, directeur gĂ©nĂ©ral de GC Aesthetics, l’un des fabricants destinataires du courrier.
Selon lui, il n’y a « aucune relation de cause Ă effet dĂ©montrĂ©e » entre le caractĂšre texturĂ© des prothĂšses et le LAGC, « ni que c’est (leur classification) macro- ou micro- qui fait la diffĂ©rence » dans le risque encouru par les patientes.